La crise ivoirienne depuis quelque temps occupe dans les journaux de nombreux grands pays les colonnes les plus importantes. Tout le monde s’y intéresse, parce qu’on la voit déterminante. Il s’agit en effet dans cette « crise » ( ?) de la rencontre de deux courants idéologiques de l’Afrique. L’un « Houphouëtiste » sous la férule d’Alassane Dramane Ouattara, qui défend d’une certaine proximité à la France, avec laquelle Félix Houphouët Boigny et Léopold Sédar Senghor étaient très attachés ; à l’autre, que je qualifierais de N’Krumahiste (l’idéologie africaine de Kwame N’Krumah), défendant quant à lui l’Unité africaine[1] dont Gbagbo est vu présentement – par de nombreux compatriotes africains – comme le représentant.
Unité africaine ou lien serré à la France, tout cela importe peu. Ce qu’il faut dans la réalité c’est d’utiliser les richesses ivoiriennes, les matières premières au profit du peuple ivoirien. A cette tache : qui n’a pas échoué ? La Cote d’Ivoire pendant bien longtemps a maintenu de très bonnes relations à la France depuis son fondateur Houphouët Boigny, qui n’a pas vraiment fait grand-chose pour le peuple ivoirien, jusqu’à ce que Gbagbo lui-même accède au pouvoir en 2002 qui ne change pas non plus grand-chose de la donne, outre qu’un combat idéologique pour la prise du pouvoir et sa maintenance.
Et aujourd’hui, c’est comme si la Communauté internationale était divisée sur ce dossier. Les Etats-Unis, de la France, les pays occidentaux en majeure partie soutiennent Ouattara, alors que des l’Afrique du Sud, l’Angola, la Lybie même quand en crise elle aussi, la guinée Equatoriale, la Gambie et la Russie également.
Depuis l'intervention de la France en appui à Alassane Dramane Ouattara pour déloger Laurent Gbagbo, de nombreuses gens meurent, plus particulièrement des jeunes. Tantôt par attaque des forces outtariennes venus du Nord, des troupes de la licorne[2] ou bombardement par les avions MI-24 de l’ONUCI.
Récemment, 2707 jeunes dans le camp de Gbagbo sont tués, m’a rapporté certains une source évoluant en Cote d’Ivoire, devant la Résidence et le Palais Présidentielle, le jour de l'intervention de la force licorne (française). Cette même source soutint aussi que la Russie détient les photos des corps des victimes que la France négocie pour éviter que le dossier fasse scandale.
Toutefois, la question que l’on devrait se poser c’est : pourquoi le président Nicolas Sarkozy s'acharne-t-il autant à renverser Gbagbo? Il s'y implique comme s'il était lui-même un Ivoirien. A une certaine époque, l'Union Européenne (UE) avait approuvé d’interdiction de voyage en aucun pays l’union deux Français (l’entrepreneur Frédéric Lafont et son épouse, Louise Kado-Lafont), qui se trouvaient sur une liste de 59 personnes, pour soutien à Laurent Gbagbo. Or, ce sont des citoyens qui n’ont pas besoin de visa pour aller en aucun des 27 pays de l'UE. Cette décision a mis le porte-parole du Quai d’Orsay, monsieur Bernard Valéro, dans ses petits souliers, lorsque certains journalistes lui ont contacté.
A mon sens, et je ne réclame pas plus que les Grandes Puissances aient au moins un minimum de décence pour se positionner de façon médiane lorsqu’il est question d'un conflit interne dans un pays, respectant étant la souveraineté de l'Etat en question. L'attitude du président Sarkozy jusque-là laisse présager qu'il y a des intérêts supérieurs qui se défendent dans l'appui et/ou l'intervention militaire de la France. Pourquoi cette même communauté dit-on internationale n’a pas fait autant dans la présidentielle de 2000 aux États-Unis d'Amérique opposant Georges W. Bush et Albert Arnold Gore qui a obtenu 500.000 voix de plus au niveau national sur son adversaire, mais dont on a justifié une remise de pouvoir Bush par un prétendu système de grands électeurs qui a rendu la Floride déterminante, cet Etat dont le frère de Bush, Jeb Bush, est Gouverneur?
En plus de ce cas états-unien, on trouve également de nombreux autres exemples pareils à ce qui se passe en Cote d’Ivoire, dont, par drôle de coïncidence, la Communauté internationale n’en fait aucune d’intervention. Le professeur Jean-Paul Pougala dans un article titré « La crise ivoirienne ou le prélude à la guerre Chine Occident » a évoqué trois exemple qui élucident bien notre démarche :
1- Le 19 décembre 2010, on a voté en Biélorussie, le président sortant a proclamé qu’il a gagné avec 72% et a aussitôt mis en prison les dirigeants de l’opposition. Y-a-t-il un seul pays Européen qui a menacé ce pays d’utiliser la force pour déloger Alexander Loukachenko au pouvoir depuis 16 ans ? L’Union Européenne n’a prévu aucun plan militaire pour aller déloger le dictateur. La raison est simple : les 27 pays de l’Union Européenne ont à cœur la valeur de la vie de leurs frères et sœurs de la Biélorussie. C’est à chacun de soigner ses intérêts et les Européens considèrent la vie humaine en Biélorussie plus importante qu’un dictateur qui s’en ira tôt ou tard.
2- Le Secrétaire Générale des Nations Unies M. Ban Ki-Moon et le Représentant de l’ONU en Cote d’Ivoire M. Y Choi sont tous les deux citoyens d’un pays divisé en deux, la Corée. Il y a un des deux présidents Kim Jong-Il qu’ils disent fou et un danger permanent pour sa propre population et pour ses voisins. Mais pour Kim, M. Y Choi et M. Ban Ki-Moon ont toujours justement prôné la retenue.
A ceux qui veulent faire la guerre en Cote d’Ivoire j’ai deux questions : En quoi la vie d’un Coréen serait-elle plus précieuse à préserver que celle d’un Ivoirien ? En quoi la mort des populations civiles en cote d’Ivoire serait-elle moins grave qu’en Corée ? En quoi Laurent Gbagbo est-il plus dangereux pour ses voisins que le dirigeant Nord-Coréen M. Kim Jong-Il ? au pouvoir hérité de son père depuis 17 ans et qui lui-même l’avait exercé pendant 46 ans jusqu’à sa mort et qu’il s’apprête à passer à son fils.
3- En Birmanie (Myanmar) en 2000 un vainqueur des élections présidentielles a été privé de sa victoire, pire, privé de liberté depuis 10 ans, Mme Aung San Suu Kyi s’est contenté en silence d’un prix Nobel de la paix, sans jamais exiger une quelconque intervention de l’extérieur pour aller déloger les usurpateurs du pouvoir. La victoire de Mme Aung San Suu Kyi validée par la Cour Constitutionnelle Birmane est-elle moins importante que la défaite de M. Ouattara déclarée perdant par le Conseil Constitutionnel de son pays ?[3]
En plus de ces trois exemples que prend le professeur Pougala, il y a aussi des exemples africains qui pourraient servir de piste pour une sortie de crise ivoirienne. En premier lieu. Au Kenya il y a eu un contentieux électoral qui opposait l’ancien président Mwai Kibaki à Raila Odinga qui, malgré s’est reconnu vainqueur, pour éviter de tomber à une crise, a accepté d’être Premier ministre du président kenyan qui devrait laisser le pouvoir alors qu’il se reconnaît vainqueur. En dernier lieu, au Zimbabwe également il y a eu un contentieux électoral où l’on a su trouver une solution sans que ca soit en crise comme la Cote d’Ivoire. Et il y a plein d’autres exemples dont on a solutionné, à l‘exception de celle ivoirienne.
Gbagbo n'est pas un Saint, je le reconnais, tout comme Ouattara non plus, mais que l'on trouve un consensus pour le bonheur des Ivoiriens. Pas celui de Ouattara ou de Gbagbo. Car les jeunes ivoiriens doivent cesser de tomber sous les balles sacrificatrices d’avares de pouvoir, de jusqu’au-boutiste-politique. Les jeunes sont l’avenir de la Cote d’ivoire. Il est du devoir la Communauté Internationale, si celle-ci existe de fond réellement, qu’elle intervienne pour mettre fin à cette guerre fratricide.
Je ne sais pas si je me trompe, mais je crois qu’on m’a appris que l’ONU a pour mission de maintenir la paix au sein des nations. Que fait-elle dans le cas ivoirien ? En tant qu’observateur, je vois que ça n’a rien à voir à ce qu’elle est en train de faire à Abidjan. C’est plutôt la peur au lieu de la paix. Car ces gens qui meurent n’ont rien à voir avec la paix, mais plutôt un soutient sans bornes que l’on tient à donner à Ouattara, que la communauté (entre guillemets) internationale[4] reconnait comme vainqueur de l’élection présidentielle, contrairement au Conseil Constitutionnel[5] ivoirien qui reconnait la victoire du président Gbagbo.
En principe, le premier devoir de la Communauté internationale dans cette crise électorale à Cote d’Ivoire et n’importe où ailleurs, devrait être de promouvoir le respect des lois, des principes juridiques établis pour favoriser l’établissement de la démocratie, et non le contraire. De même qu’en Haïti, c’est la Conseil Electoral Provisoire qui est l’organe juridiquement reconnu pour proclamer les resultats des élections et non le Centre de tabulation ou monsieur Edmond Mulet, à Cote d’Ivoire c’est le Conseil Constitutionnel et non la Commission électorale.
Pol, Roudy Stanley PENN
Président de JEUNESSE MONTANTE
[1] Voir à propos N’Krumah et le rêve de l’unité africaine écrit par Lansiné Kaba, Editions Chaka
[2] A souligner que présentement les forces de la licorne se trouvent à 1700 soldats.
[3]www.camerounexpress.com « La crise ivoirienne ou le prélude à la guerre Chine Occident », 11 janvier 2011
[4] Si le Représentant du Secrétaire général de l’ONU en Cote d’Ivoire s’est pressé à approuver les résultats diffusés par la Commission électorale pendant que celle-ci n’était plus compétente. Car, le délai prévu par la loi ivoirienne avait déjà été dépassé parce qu’était parvenu au Conseil Constitutionnel.
[5] Juridiquement, le Conseil Constitutionnel est le organe compétent légal pour valider et publier les résultats finaux des élections à Cote d’Ivoire.