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27 février 2015 5 27 /02 /février /2015 22:39

Tous les hommes ne sont pas faits pour devenir président. Tous les présidents ne sont pas habilités non plus à devenir de grands hommes politiques. Anténor Firmin fait partie de ceux qui figurent, sans ambages, parmi les plus emblématiques figures politiques ayant traversé l’histoire d’Haïti. Il a failli être président mais le cours de l'Histoire en a décidé autrement.

Ce jeune intellectuel du Cap a véritablement démarré sa vie politique sous le président Florvil Hyppolite où il a occupé simultanément les postes de ministre du commerce, des finances, des relations extérieures et des cultes. Il a profité de son passage pour reformer l’administration, contrôler les recettes des douanes et soumettre la comptabilité publique à une rigueur de vérification. Ce qui a permis aux recettes de l’Etat, à l’époque, d’augmenter très rapidement. Etant la tête pensante du gouvernement de Florvil Hyppolite, Firmin aura à endosser des responsabilités dont il subira les répercussions durant toute sa vie. Administrativement compétent, le président Hyppolite lui a confié la négociation avec l’amiral Bancroft Gherardi sur la cession du Môle Saint-Nicolas, une négociation qui trouve sa légitimité dans la guerre civile qui précéda l’avènement de Florvil Hyppolite au pouvoir. Les Etats-Unis réclamaient le Môle Saint-Nicolas ainsi que le leur avaient promis les révolutionnaires nordistes afin d’obtenir des armes dont ils s’en étaient servis pour déloger Légitime du Palais national et assurer leur victoire militaire. Idée que soutenait aussi la presse états-uniènne. Ministre des Relations extérieures qu’il était, Firmin n’a pas accepté de céder le Môle Saint-Nicolas. Son refus catégorique lui valut une grande popularité, mais en même temps, le mettait sous l’œil scrupuleux de Tonton Sam.
A cause de sa réussite au Ministère des finances sous Hyppolite, de nombreux journalistes du pays, au moment où la situation économique du pays se détériora sous le Président Sam, entreprirent une campagne pour que le Chef d’Etat l’appelle à ses côtés. Effectivement, en décembre 1896, il fut installé comme Ministre des Finances et du Commerce. Suite à une interpellation de la Chambre des Députés, il démissionna de son poste. Une décision qui lui rendit encore beaucoup plus célèbre. Rappelons au passage, qu’on l’a interpellé à cause de sa gestion rigoureuse du trésor public. Il empêchait la gargote du peu de ressources qui disposait le pays.
En 1902, Firmin a définitivement envisagé la prise du pouvoir. Les circonstances ont décidé autres. Comme je l’ai précédemment mentionné, tous les hommes ne sont pas faits pour devenir président. Soutenu par la jeunesse de l’époque, l’homme du changement attendu et réclamé, était contrecarré par les politiciens traditionnels, certains manipulateurs du corps des officiers de l’armée et une bonne frange de la bourgeoisie qui voyaient en Firmin un menace pour le statu quo. Le firminisme par sa vision et les changements qu’il comptait opérer au sein de l’Etat, a suscité des peurs et lancinaient pas mal de grands barons.
J’entends souvent de la bouche de certaines personnes très avisées pourtant que le peuple avait choisi Nord Alexis au détriment de Antenor Firmin. Ceci est faux. Ce sont là des arguties voulant à tout prix dénigrer le peuple haïtien sous prétexte qu’il a l’habitude de procéder lors des périodes électorales à des choix qui favorisent des cancres pouvoir au détriment de plus instruits. Bien que ceci soit un faux débat, il importe de signaler quand même que Nord Alexis n’a remporté aucune élection face à Antenor Firmin. Alexis n’était d’ailleurs pas candidat. Ce dernier a fait un coup d’état en s’imposant comme président de la république le 17 décembre 1902, qu’il a par la suite fait légitimer de force par un parlement qui, bien qu’en majorité firministes, n’avait guerre d’autres choix.
Rappelons que Antenor Firmin avait lui aussi la possibilité de prendre d’assaut le pouvoir lorsque venant à Port-au-Prince, le peuple l’avait ovationné criant que sa place était au Palais. Ce qu’il a refusé parce qu’étant un défenseur acharné des principes du respect de la démocratie, voulant de préférence atteindre le Palais par les urnes. Firmin est un exemple de démocrate.
A mon avis, le plus grand démocrate haïtien.

 

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12 février 2015 4 12 /02 /février /2015 01:04

10390264_861794350511834_970078118153724259_n.jpgLorsqu’on parle d’homme politique, de dirigeant de parti et de conviction politique en Haïti, c’est d’office que monte sur le plateau le nom d’Edmond Paul. C’est un idéologue conséquent, quelqu’un qui n’a vacillé même pas une seule fois dans sa vie de politicien. Ce fondateur du Parti libéral haïtien a pendant toute sa vielutté en faveur de l’éducation des masses et de la promotion de l’industrialisation du pays. Antenor Firmin dit de lui « la plus haute incarnation de notre conscience nationale. » Il a toujours dit ce en quoi il a foi. Il a toujours prêché à la faveur d’un pouvoir législatif fort, qui soit en mesure de contrôler l’Exécutif. Un pouvoir législatif responsable, avec de vrais hommes d’Etat.
Après la catastrophe monétaire provoquée par Sylvain Salnave avec ses « zòrèy bourik », c’est Edmond Paul et d’autres collègues parlementaires comme Boyer Bazelais qui réussirent à retirer ce papier en circulation. Edmond Paul nous montre que les hommes peuvent aussi faire valoir les postes. Quand de grands hommes occupent une fonction quelconque, la fonction devient prestigieuse, parce qu’il le comble de son étoffe. Si aujourd’hui, pour plus d’uns, être député est une simple fonction, Edmond Paul nous a montré que cela dépend de la personne. Quand n’importe qui est député, il est n’importe quel député. De même que si n’importe qui est président, il est n’importe quel président. Il est de toute notre histoire de peuple, « le plus grand député haïtien ».
S’il est aussi reconnu comme un grand intellectuel haïtien, ce n’était pas son souci à lui. Il écrivait dans le souci de partager ses convictions, ses désaccords et ce en quoi, du plus profond de lui-même, pensait pouvoir sortir Haïti du gouffre du sous-développement. Toute sa vie, il fait plaidoyer en faveur de l’éducation de masse. Une population éclairée et avisée était pour lui la meilleure solution au mal politique national. Comme il l’a dit dans son livre Les causes de nos malheur : « La bête succombe quand la pâture fait défaut, ainsi meurt le charlatan quand le peuple est éclairé. »

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12 février 2015 4 12 /02 /février /2015 01:00

10671243_861108150580454_6983166017318654679_n.jpgN’est pas fondateur de patrie qui le veut. Dans chaque pays, il n’en existe qu’un et le notre est Jean Jacques Dessalines. Détesté par les français – nous savons pourquoi –, il reste incontestablement l’homme sagace, sans qui, l’accomplissement de l’indépendance serait impossible. Toussaint ne pouvant pas être Dessalines et Dessalines ne pouvant pas être son Toussaint, ils avaient chacun leur part d’accomplissement dans la lutte pour la création de la première nation nègre de l’hémisphère occidental.

Dessalines est grand, non seulement pour avoir créé Hayti, mais sa grandeur vient aussi de sa volonté à la création d’un Etat qui fait de la liberté des hommes son principe sacro-saint. Vient ensuite, son niveau d’émancipation pour ne pas être pris dans le piège de l’aliénation coloniale en déclarant que tous les haïtiens sont « Noirs ». Un blanc naturalisé haïtien, devient du même coup « Noir ». Il a donc résolu la question de couleur. Ainsi, pour Dessalines, il existait trois types de noirs :
1. Nwa po fonse.
2. Nwa po klè.
3. Nwa po blan.
Point barre.
Comme plus d’uns l’ont aussi reconnu, Dessalines a donné une vocation à Haïti, celle de la liberté, qui consiste à offrir notre contribution à tout peuple qui la sollicite en vue de sortir de la tutelle d’un autre. Dessalines est un leader hors pair. Il est l’homme qui a posé la plus grande question de toute notre histoire de peuple : « Et ceux dont les pères sont en Afrique, n’auront-ils donc rien ? » C’est la question qui l’a assassiné, la question qu’il ne fallait peut-être pas poser, celle qui dérange, celle qui nous divise. La question de la terre.

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12 février 2015 4 12 /02 /février /2015 00:56

1010151_860847523939850_6975536123685330180_n.jpgToussaint Louverture n’a pas vu la création de Hayti, mais pensez-vous que ce pays existerait sans le grand travail qu’il a accompli, sans son audace incommensurable ? Sans les virements et revirements de Toussaint, la victoire aurait été impossible face aux puissances esclavagistes de l’époque. Seul son jeu pouvait les vaincre en semant la confusion autour d’elles, jusqu’à ce qu’il devienne trop tard. Jusqu’à ce que nous soyons prêts.
Toussaint avait cette lucidité, sinon il aurait péri comme Bookman, la tête exposée sur une place comme exemple pour tout autre rebelle. Les français ont pris du temps pour comprendre son jeu, mais il était déjà trop tard. La liberté générale était déjà proclamée. Ses lieutenants avaient déjà reçu les meilleures formations auprès des armées coloniales. Toussaint est ce qu’il est : un homme que jusqu’à aujourd’hui encore on cherche à comprendre. Un mystère. Une énigme. Son génie lui vaut des pages et des pages d’histoire de la plupart des plus grands historiens du monde. Lors du bicentenaire de la célébration de sa mort en 2003, Rony Durand, président de la commission, a dit : « Ils sont au nombre de trois, les hommes qui pont traversé l’histoire de l’humanité. C’est d’abord Socrate, qui est mort pour la vérité, ensuite Jésus, qui est mort pour sauver l’humanité et enfin Toussaint Louverture qui est mort pour la liberté des Noirs et des humiliés de par le monde. »

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2 février 2015 1 02 /02 /février /2015 19:48

« Dès que dans une collectivité, à une époque donnée, il doit se réaliser de grandes choses pour la réalisation de plus de justice et de lumière parmi les hommes, il jaillit de la matrice de la race un leader qui dans son équation personnelle synthétise toute la conscience de cette collectivité »
Lorimer Denis et François Duvalier

Etre un homme politique c’est simple, mais devenir un « grand homme politique » n’est pas une chose facile. S’il n’est pas facile d’être un grand homme politique, il est encore plus difficile d’être parmi les « dix plus grands hommes politiques ». Ce n’est pas au politicien d’en décider s’il est grand ou pas, cette tache ne revient pas non plus à ses partisans, ni à ses fanatiques, mais à l’histoire qui constitue le grand juge par excellence. Richard Nixon, ancien président des Etats-Unis a écrit « Leader », un livre à travers lequel il parle d’hommes qui, durant toute sa carrière politique l’ont fortement marqué. Ces hommes, dit-il, ont, par leur manière, contribué chacun à la construction de ce monde dans lequel nous vivons.
Dans ce texte qui n’a rien de général, j’avais voulu présenter pour ma part des hommes qui, dans la vie politique haïtienne, ont constitué à eux seuls, des élans, des rêves, des accomplissements et ont changé le cours de notre histoire.
Poser un grand acte ne suffit pas à faire d’un politicien un « grand homme politique » ; être admiré par ses contemporains pour les faveurs qu’ils ont bénéficié de vous pendant que vous étiez au pouvoir, ne fait pas non plus d’un politicien un grand homme politique. De même, ce ne sont pas non plus les titres portés et les fonctions occupées qui font d’un homme politique un grand. On peut avoir été député, maire, sénateur, ambassadeur, ministre, chef d’Etat sans pour autant avoir été un « Grand homme politique ». Ce qui rend l’homme grand en politique c’est sa conviction, ses combats, ses accomplissements au moment où il avait la possibilité, mais surtout ce qu’il incarne dans la mémoire collective. La mémoire ne garde que ce qui l’a marqué. Non ce qui l’a flatté.
Je n’ai nulle intention de faire étalage ici d’une liste inamovible. Elle n’est donc pas exempte des critiques. Mais désaccord ou pas, j’imagine fort difficile que l’on ne se mette pas d’accord plus ou moins, sur la valeur réelle de ces personnalités que je vais présenter. On ne saurait ne pas reconnaitre qu’ils constituent des gens qui ont grandement marqué notre vie de peuple par leur passage.
L’usage du concept « d’hommes politiques » et non « d’hommes d’Etat » est pour éviter de restreindre la liste rien qu’à des personnalités qui ont occupés des postes de décision au sein de l’Etat. J’avais voulu ouvrir le champ à des figures qui, dans la vie politique du pays, n’ont pas été à des postes électifs ou nominatifs, mais qui, politiquement, sont eux aussi grands.1486618_860241840667085_4552868900637902967_n.jpg

Cela m’a donc demandé une grande épuration, une grande sélection dénuée de toute passion et de fanatisme pour arriver à des hommes qui surpassent tout autre, des hommes qu’on peut certes ne pas personnellement aimer mais qu’on ne saurait ne pas admirer. Qui sont-ils ?

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27 mai 2013 1 27 /05 /mai /2013 22:07

Vous avez les yeux loin, les yeux perdus, très loin, des fois trop loin à chercher l'amour. Comme si l'amour se cachait. Comme si l'amour nous cachait. Mais pourquoi ? Pourquoi l'amour irait-il si loin? Si loin de nous...

Ce qu'on cherche nous cherche aussi. Ce qu'on désire nous désire aussi. Et ce qu'on aime nous aime aussi.

Lorsqu'on aime quelqu'un c'est parce qu'on est d'abord attiré par ce quelqu'un. Et on n'est pas attiré comme ça. L'attirance est sacrée. L'attirance est divine. Si quelqu'un à le pouvoir de nous attirer, de forcer notre regard, notre cœur, notre passion à tourner vers lui, peut-être sans le vouloir ou sans le savoir, c'est qu'il a pu toucher notre fort intérieur, c'est qu'il connait notre faiblesse, c'est qu'il a le pouvoir de nous apporter de la joie, de nous procurer du bonheur. Aimer, c'est sacré. Aimer est divin.

Peu importe le temps que cela prend. Aussi court et insignifiant qu'il soit. L'important c'est qu'on se sente, un instant de sa vie, aimer et être aimé. Les instants de bonheur sont précieux. Les instants de bonheur sont gracieux...

L'amour est partout et en tout. En n'importe quoi. Vraiment n'importe quoi. L'amour est là. Là dans le vent. Là dans nos voix. Dans les chansons. Dans les films. Dans les photos. Dans les tableaux. Dans le paysage. Dans le soleil. Dans la lune. Dans les étoiles.

L'amour est là. Là dans ces choses qui passent devant nous. Dans le chauffeur de taxi. Dans le pauvre sur le trottoir. Dans le bébé qui sourit. Dans le marchand ambulant. Dans le patron. Dans l'employé. Dans le riche. Dans le pauvre. Dans l'enfant. Dans l'adulte. Dans le pasteur. Dans les fidèles. Dans le houngan. Dans les hounsis. Il est là sous nos yeux. Partout et en tout. L'amour est partout et en tout.

L'amour ce n'est pas cette chose d'envergure que nous recherchons. Non. Pas du tout. Des fois, nous sommes trop exigeants. Envers nous, envers les autres. Nous demandons trop. Trop, au point que le peu qu'il nous faut, nous le négligeons ou le refusons.

Vous n'imaginez peut-être pas, mais l'amour peut être un détail. Des détails. Un détail comme cet oreiller sur lequel vous posez chaque soir votre tête. Un détail comme cette belle robe que vous avez achetée et que vous rêvez d'une occasion à la porter. Un détail comme votre trousse de maquillage. Un détail comme votre brosse et votre peigne qui sont là pour vos cheveux. Un détail comme ce bonjour qu'il vous a dit. Ce texto qu'il vous a envoyé. L'odeur de son parfum que vous sentez de temps en temps. Ce souvenir de baiser que vous ressassez dans votre mémoire. Le goût de ses lèvres qui s'éternise dans les vôtres.

Moi, je ne cherche pas l'amour. Je me contente à le sentir. Je me contente à le sentir à travers des détails. Des détails comme mes cravates. Mes chemises. Mes souliers. Ma chambre. Ma penderie. Vraiment des détails. Des détails comme le sourire de mes amis. Leur franche amitié.

Je me contente à le sentir dans les bouquins que j'achète. Dans les livres que je lise. Dans les poésies que j'écrive. Mais aussi dans mes combats. Dans vos combats. Dans nos combats.

Je me contente à le sentir. Je me contente à le sentir dans les rayons du soleil, dans l'éclat des étoiles, dans les arbres, dans les fleurs, dans les oiseaux...

Je me contente à le sentir dans les sentiments de joie de ma mère. Ses sentiments de joie lorsqu'elle me voit. Lorsqu'elle me voit rentrer, lorsqu'elle qu'elle me fait à manger, lorsqu'elle qu'elle me raconte son passé, lorsqu'elle passe me couvrir avec un drap quelconque dans ma chambre, lorsqu'elle me dit qu'elle m'aime...

Je me contente à le sentir aussi dans les yeux de mes petites sœurs. Dans leur sourire. Dans le plaisir qu'elles prennent à ne pas dormir pas avant que je rentre. Dans le plaisir qu'elles prennent à me raconter des histoires. A me chanter des chansons, malgré des fois l'exagération de leur voix. Je le sens fort. Très fort.

Très fort dans les instants aussi que je pense à toi. Oui toi Dan, toi ma Danie adorée. Toi qui fait palpiter mon cœur. Toi que j'aime. Toi que j'aime tant. Tellement. Toi mon petit cœur adoré, mon trésor. Oui toi. Je le sens fort. Très fort.

Je le sens fort. Je sens fort l'amour quand tu m'appelles. Quand mon téléphone sonne et que c'est toi. Quand j'entends ta voix. Quand je sens ton odeur. Quand je sais que tu vas venir. Quand je te regarde. Quand je t'embrasse. Quand je te touche. Quand on se parle. Quand on se dit combien on s'aime. Quand on parle de nos projets, de tout et de rien. Quand quand quand quand... Je le sens fort.

L'amour pour moi c'est simple. C'est pas compliqué. Rien de compliqué. Je me contente à le sentir comme ça. Ainsi. Aussi simplement.

Si vous compliquez l'amour, il vous compliquera peut-être la vie. Sentez, vivez-le dans des instants simples. Sans complication. Continuez. Oui, je vous en prie, continuez à sentir l'amour. A le sentir dans les secondes nécessaires. Dans les minutes nécessaires. Au volent de votre voiture. Dans la plume que vous tenez. Dans l'ordi qui est devant vous. Dans les poignets de main que vous échangez. Dans les sourires que vous partagez. Dans les personnes merveilleuses que vous rencontrez. Sentez l'amour au quotidien. Autant que vous pouvez. A chaque instant. A l'instant même.

 

Roudy Stanley PENN

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20 mai 2013 1 20 /05 /mai /2013 19:12

    En Histoire, certains événements ont leur poids par la date qui les soutienne. Quand on voit la date, on voit l’événement. Et un événement ne pourra véritablement s’immortaliser et s’ancrer dans la réalité d’un peuple que s’il ne lui est consacré une date. Sinon il n’existera que vaguement.

    Lorsqu’on parle de 18 mai dans l’histoire d’Haïti, deux événements nous montent surtout à l’esprit. D’abord, la fête du drapeau (fondamentalement), ensuite la fête de l’Université d’Etat d’Haïti. Mais en dehors de ces événements majeurs, le 18 Mai est aussi le berceau d’un autre événement de même acabit : le revirement de Toussaint.

 

LE REVIREMENT DE TOUSSAINT : STRATEGIE POUR LA SURVIE D’UNE CAUSE

    Il s’agit en effet de l’une de nos plus belles références historiques, surtout avec Toussaint Louverture. Bien que personnellement, j’ai des réserves sur ce dernier, mais fondamentalement, il reste l’un des plus grands stratèges politiques qu’a accouchés la matrice haïtienne.

    Le revirement de Toussaint doit aujourd’hui être compris et bien compris pour mieux articuler nos actions politiques. On peut s’en servir. Les dirigeants d’aujourd’hui ne savent pas virer. Voire revirer.

    Reprenons un peu l’histoire.

    S’étant rendu compte du jeu des Espagnols qui, en fait ne s’intéressaient pas vraiment à la liberté des esclaves, Toussaint Louverture écrit à Laveaud : « ces gens de l’Espagne sont des perfides qui cherchent à détruire les chefs noirs en les opposant les uns aux autres ». Toussaint a compris le petit jeu espagnol qui, dans la réalité, consistait à corrompre les chefs des rebelles, à les délecter d’apparats pour les détourner de leur vraie mission. Toussaint a tout compris et il voulait réorienter les choses. Il a vu menacer la cause. Il a compris qu’il fallait opter pour d’autres options.

    Il faut dire que l’homme de Bréda a été depuis le début de la révolution un stratège. C’est lui qui a été à la base de la rumeur faisant croire aux esclaves, avant la cérémonie du Bois-caïman, que la métropole française leur avait offert des jours de liberté. Que c’était les colons qui n’avaient pas respectés cet engagement. Toussaint a toujours été un homme politique. Un stratège d’une grande envergure.

    Lorsque Toussaint a remarqué qu’il n’y avait pas d’avenir aux cotés des Espagnols pour le combat antiesclavagiste, que les autres leaders étaient déjà piégés et corrompus, il s’est engagé par son audace et ses contacts à redynamiser la lutte tout en créant cette fois son leadership, mais de façon autonome.

    C’est ainsi qu’à Marmelade, en date du 18 mai 1794, l’homme de l’Ouverture écrit la lettre par laquelle il repasse dans le camp français. Le plus intéressant à travers cette lettre, c’est l’audace aiguisée par Toussaint. Il traite avec Laveaud sur pied d’égalité. C’était justement pour donner force à la nouvelle vague qu’il entend mener. Pour ne pas laisser présager de doute. Il confirme son leadership.

    Toussaint est un homme d’audace. Il est un homme de tête en même temps. On peut ne pas l’aimer, mais il est difficile de ne pas l’admirer.

    Ce que l’on doit surtout apprécier dans le revirement de Toussaint est sa capacité à comprendre : bien que les esclaves soient nombreux dans la colonie, ils ne disposent toutefois pas de moyens matériels pour contrecarrer les puissances coloniales établies et intéressées à Saint-Domingue. La seule compétence qu’ils avaient était celle, peut-être, de servir les colons comme domestique, planteur etc. Donc, pour mener la bataille, il fallait qu’en plus de la rage, de la haine, de la fougue et de la détermination des esclaves, qu’ils puissent dans un premier temps obtenir des armes, qu’ils apprennent à les manier ensuite, et enfin que des méthodes de combats soient développées pour éviter qu’ils soient trop vulnérables. Car les esclaves étaient indisciplinés. Ils n’étaient pas une force organisée. Ils ne pouvaient aucunement bien mener un combat. Et face aux moyens que disposent les Espagnols, les Anglais et les Français, si seulement ces derniers avaient compris le jeu de Toussaint, le plan serait déjoué et Toussaint lui-même, serait fichu.     

    Dans l’intérêt de ses frères de race, celui qui s’est autoproclamé « le premier des noirs » a usé de son sens de stratège pour se mettre au service de la France, non pas pour servir celle-ci, mais pour avancer avec la cause de la liberté des esclaves.  

    Toussaint Louverture a reviré pour le bien commun. Il n’a pas reviré par mégarde ni par intérêt personnel. Il a fait un revirement stratégique. C’est un acte d’une grande portée politique. 

    Cela me permet de comprendre que ce n’est pas toutes les fois, en politique, qu’il faut être radical. Très souvent pour des Etats comme le nôtre, les petits Etats, si l’on me permet de parler ainsi, il serait toujours mieux que les leaders soient des louverturiens, sournois, audacieux. Sinon leur vision, quoique noble, peut s’avérer fœticidaire. Sinon l’ouverture ne sera pas possible.

 

DE L’UTILITE ACTUELLE DU REVIREMENT

    Ce rappel sur le revirement de Toussaint n’est pas à une fin récitatoire. Nous connaissons suffisamment ce qu’est le revirement de Toussaint. Nous l’avions étudié. Là où je voulais en venir, c’était de savoir en quoi, aujourd’hui, cet acte si génial de Toussaint Louverture pourrait nous inspirer politiquement ?

    De la période des fondateurs de la patrie haïtienne, le défi était sans aucun doute celui de « liberter les esclaves de Saint Domingue ». Aujourd’hui, il ne s’agit pas de la même réalité. Nous n’avons donc pas à virer pour la liberté car nous n’avons pas d’esclaves. Mais nous pouvons le faire pour le développement national. Car nous disposons aujourd’hui de la mauvaise économie de l’hémisphère occidentale. Nous sommes le pays plus pauvre du continent. C’est là aussi un grand enjeu. Si les esclaves travaillaient sans salaire. Beaucoup de citoyens et citoyennes sont aujourd’hui libres mais ne disposent pas de travail.

    Il faut donc des leaders stratégiques de la trempe de Toussaint Louverture, pour comprendre qu’il faut virer et revirer, qu’il faut tourner les grandes puissances, qu’il faut les utiliser jusqu’à ce que nous soyons en mesure de voler de par nous-mêmes. C’est à mon sens ça le néolouverturisme. C’est utiliser l’astuce et l’audace de Toussaint Louverture pour profiter des grandes puissances internationales.

    Les petits Etats comme le nôtre, très mal vus, et en même temps enviés par les puissances impérialistes, ont de l’intérêt à pratiquer le néolouverturisme.

    Le Néolouverturiste serait donc « quelqu’un qui puisse élargir sa marge de manœuvre autonome, jouer un partenaire vis-à-vis des autres peuples en exploitant les contradictions du moment, diversifier ses partenaires dans l’entreprise de s’émanciper de la domination d’un seul » pour paraphraser un peu le professeur Lesly F. Manigat dans Les Douze facettes du génie de Toussaint Louverture. Nous avons donc de l’intérêt. Les stratégies appliquées par Toussaint Louverture ne sont pas caduques. Elles sont encore épuisables et utilisables politiques. Il suffit tout simplement de les approprier à la réalité.

 

CE PEUPLE QUI A ACCOUCHE TOUSSAINT LOUVERTURE NE PEUT PAS MOURIR  

    En préfaçant Radiographie d’une dictature du professeur Gérard Pierre CHARLES, Juan BUSCH l’ancien président éminent intellectuel de la République Dominicaine nous dit que « ce peuple qui a accouché Toussaint Louverture ne peut pas mourir ». Effectivement, le peuple haïtien ne doit pas mourir. La situation dans laquelle nous évoluons aujourd’hui n’est pas une fatalité. Nous pouvons la changer. Nous pouvons tout changer, aussi peu et faible que sont les moyens que nous disposons. Si nos ancêtres aussi vulnérables qu’ils étaient ont pu nous léguer un pays libre et indépendant, nous pouvons tout aussi changer la réalité dans laquelle nous vivons aujourd’hui. Nous avons seulement besoin d’être stratégiques. Ce n’est qu’en étant de vrais stratèges que nous pouvons sauver ce pays face à ces puissances prédatrices. Il nous faut comprendre qu’il ne pas être statique. Il faut virer et revirer, en étant nous-mêmes, mais en ayant les yeux rivés un peu partout à la recherche d’opportunités.

 

Port-au-Prince, le 17 mai 2013

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14 mai 2013 2 14 /05 /mai /2013 20:32

« Les Capitalistes étrangers font tout pour l’argent. Ils essaient même de nous vendre la corde avec laquelle nous les pendrons. »

Lénine

 

    Le capitalisme est un jeu de coquins. Sans pitié. Beaucoup d’hypocrisies. On s’en fou. Tout ce qu’il faut c’est de l’argent.

    Celui qui m’a vraiment permis d’avoir une idée du système capitaliste international est mon ancien professeur, le Dr Max Paul. Sans vouloir nous faire des adeptes d’un quelconque courant, il nous filait tout type de documents. Question de pouvoir bien balancer nos réflexions. Ce qui manquait après tout cela, c’était notre propre réflexion. Qu’elle soit différente ou pas des autres, l’essentiel c’est qu’on arrive à assumer quelque chose. Notre propre analyse. Ce que nous nous pensons…

    Jusqu’à aujourd’hui, je prends encore du temps pour étudier minutieusement le système capitaliste. Car il s’agit en effet d’un système complexe. Ce qui m’a surtout intéressée c’était de comprendre son fonctionnement dans les relations internationales. Comment est le jeu entre les Etats ? Entres les Etats et les Firmes multinationales ? Entre les Multinationales ? Car j’ai assisté à pas mal de conversions. Le virement chinois. Le grand prêt à l’Union Soviétique.

    Ce que le monde était il y a de cela vingt ans, n’est plus le même. Le monde a changé. Beaucoup de choses ont changé.

    J’ai entendu Obama se plaindre. J’ai vu l’Europe en crise. J’entends parler de chômage dans les pays riches. Je vois de l’inquiétude.

    Mais entre-temps, je vois aussi des pays tranquilles. Qui en profitent. Je vois la superpuissance du monde qui s’inquiète. Je vois les Chinois qui s’imposent. Je vois beaucoup d’argents. Beaucoup de contrefaçons. Un tas de choses.

    Il existe toutefois une différence entre voir et comprendre. Je veux comprendre. Ou du moins, je veux avoir ma compréhension. Car, le jeu est capitaliste, mais l’hégémonie n’est plus occidentale – ou devrais – je dire états-unienne – mais orientale en quelque sorte. Mais pour plus de précisions, la puissance montante est la Chine.

    Evidemment, vous savez que c’est la Chine. Nous savons tous que c’est la Chine. Mais ce qui importe là maintenant, c’est de savoir à quoi a joué la Chine. Ce n’est pas un hasard qui l’a permis par exemple d’être ce qu’elle est aujourd’hui. Ce n’est ni non plus « un miracle » – car ils ne sont pas Japonais. Mais c’est plutôt leur audace, une certaine compréhension du fonctionnement du système capitaliste pour arriver jusqu’à piéger les pays occidentaux.

 

LES CAPITALISTES AIMENT TROP L’ARGENT

    Lénine a compris une chose. Et la Chine comme tant d’autres pays encore a compris Lénine. Ce dernier a avancé : « Les Capitalistes étrangers font tout pour l’argent. Ils essaient même de nous vendre la corde avec laquelle nous les pendrons ». Effectivement, les capitalistes sont trop avares. Le plus important pour le capitaliste c’est le profit. Il est très pécuniaire. L’odeur de l’argent le rend dingue. C’est pourquoi, dit-on, trois C dominent le système capitaliste : Croissance Constante Continue.

   

LES MULTINATIONALES N’ONT PAS DE PATRIE

    Jean Ziegler a aussi observé quelque chose d’intéressant. Dans son livre Une Suisse au-dessus de tout Soupçon il nous a expliqué ceci : « Ce qui me frappe d’abord, au niveau de ce qui est dit par les dirigeants des entreprises transnationales eux-mêmes, c’est l’identification qu’ils proclament – pour  eux-mêmes et pour leurs entreprises – avec une subjectivité nationalitaire précise. Les entreprises transnationales se disent elles-mêmes  américaines,  françaises,  japonaises,  suisses, etc. S’agit-il d’une ruse, du souci tactique d’abriter leur propre stratégie mondiale de domination derrière le masque patriotique d’une identité nationale fictive[1]»

    Plus tard, Ziegler publiera un autre livre qui bouleversera le monde : Les Nouveaux Maitres du Monde[2]. A travers ce dernier, l’auteur nous dit que 80% des richesses de la planète se retrouvent entre les mains de seulement 20% de gens. Cette idée sera soutenue et développée par d’autres intellectuels. Ignacio Ramonet, qui lui-même a publié Nouveaux Pouvoirs, Nouveaux Maitres du Monde[3], nous dit que le cinquième le plus riche de la population de la planète, dispose de 80% des ressources. Tout en précisant que la fortune des 358 personnes les plus riches de la planète est supérieure au revenu annuel des 45% d’habitants les plus pauvres.

    Ce sont donc ces gens-là qui dirigent les Firmes Transnationales (FTN) ou Multinationales, qui décident de ce qui se fait dans le monde. Tous les ans, ils se réunissent à Davos. Ils financent des gouvernements. Ils soutiennent des rebelles. Ils provoquent la famine. Ils sont les maitres du monde. Et s’ils se cachent au départ derrière des nationalités, dans la réalité, ce qu’ils cherchent c’est l’argent. Ou du moins, petit à petit ils se plient à l’amour de l’argent.

    Alors que de jours en jours l’Europe devient de plus en plus exigeante avec une main d’œuvre qui s’estime trop qualifiée et qui, des fois, va trop loin dans ses exigences. Les maitres du monde changent la donne. Ils cherchent de la main d’œuvre à bon marché. Qualifiée aussi. Moins exigeante. Ils délocalisent leurs entreprises et mettent l’Occident dans une phase de désindustrialisation.

   

L’OCCIDENT EN VOIE DE SOUS-DEVELOPPEMENT

    L’Occident d’aujourd’hui, n’est pas l’Occident d’hier. L’Occident d’aujourd’hui n’avance pas. Elle recule. Les pays occidentaux ont tellement amassé de richesses qu’il va falloir beaucoup de temps pour voir clairement leur déclin. La crise est aigue. Beaucoup d’inquiétudes.

    Savez-vous où se trouve le plus long pont du monde ? Savez-vous dans quel pays se trouve le grand building du monde ? Connaissez-vous la nationalité de l’homme actuellement le plus riche du monde ? Savez-vous quel pays a aujourd’hui le plus de millionnaires sur la planete ? Cherchez les réponses. Compilez-les. Ensuite, vous saurez de par vous-mêmes que beaucoup de choses ont changées. Sauf que, pour comprendre vraiment il faut cesser de voir et d’analyser les choses à partir d'un oeil occidental, il est fondamental de voir aussi a partir de l'oeil oriental.

 

 

ILS ONT VENDU LA CORDE MAIS NE SONT PAS ENCORE TOTALEMENT PENDUS

    Et c’est bien cela, la corde qu’avait parlée Lénine. Les capitalistes aiment l’argent. Beaucoup. C’est à ce jeu malicieux qu’a joué la Chine et d’autres pays encore. Sauf que, tout n’est pas encore perdu pour l’Occident. Je ne saurais négligé leur capacité à remonter la barre. C’est possible. Mais tout en reconnaissant que les concurrents sont aussi intelligents. Ils sont de taille.

    Entre-temps, ce qu’il faut comprendre dans la réalité capitaliste internationale, c’est que nul pays ou Etat n’a un contrôle absolu sur quoi que ce soit. Tout est partagé. Les Chinois ont beaucoup de biens aux Etats-Unis, mais les États-Uniens aussi ont beaucoup de biens en Chine et partout a travers le monde. Les acteurs internationaux ne sont plus uniquement des Etats, mais également des individus puissants et des Firmes transnationales.

   Toutefois, je n’écarte pas non plus la possibilité que les puissances montantes soient prises dans le même piège de la corde ? Qui achètera la corde cette fois ?

 

 

Port-au-Prince, Le 13 Mai 2013

 

Roudy Stanley PENN

Politiste



[1] Jean Ziegler, Une Suisse au-dessus de tout soupçon, Editions du Seuil, 1976

[2] Ziegler, Jean, Les Nouveaux Maitres du Monde

[3] Ramonet, Ignacio, Nouveaux Pouvoirs, Nouveaux Maitres du Monde,  Ed. Fides, 1996

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3 mai 2013 5 03 /05 /mai /2013 20:50

    Je voudrais ici poser une question – peut-être des questions aussi. Et sans vouloir nuire à quiconque, je tiens seulement à demander : Est-il normal, que dans un pays, on puisse se sentir à l’aise de voir un peuple évoluer dans la consommation de détritus, de fatras étrangers et de rès moun, connus tous sous le nom vulgaire de pèpè ? Ayez le courage de me dire s’il est normal. Aussi simple que cela. Mais, la question ne doit pas seulement concerner l’Etat, j’ai aussi conscience de la force de la société civile. On peut se demander aussi pour être plus spécifique, est-ce qu’il est normal que des individus puissent se « confortabiliser » dans la consommation de pèpè, dans le port de chemises, de corsages, et de pantalons pèpè ? Est-il est normal que là où s’ouvre un bal de pèpè, il n’y a d’espace même pour piquer une épingle ? Est-il est normal dans un pays, que depuis leur naissance, des individus ne font que porter des vêtements pèpè, que des femmes, se donnent l’habitude de porter des culottes, des soutiens de gorge pèpè ? Mais où est passé la décence, l’honneur ? Où est passé notre dignité de moun et de peuple ?

    Il est vrai qu’à force de nous habituer à cette pratique, elle a tendance à passer pour normale dans notre quotidien. Mais ce n’est pas normal. Ce n’est pas normal que l’on porte des chaussettes, des chemisettes, des slips déjà utilisés. Ce n’est pas normal. Il ne peut y avoir rien de normal à cela. C’est plutôt offusquant. Déshonorant. Humiliant. C’est dégoûtant !

    Et pourtant. Aussi laid que cela puisse paraitre, cette anormalité à laquelle nous nous y habituons tellement ces derniers temps, tend à se systématiser dans notre culture vestimentaire. J’oserais même dire à s’imposer. Rares sont ceux et celles aujourd’hui qui ne portent pas vêtements pèpè. Les étudiants. Les professeurs. Les commerçants… Des fonctionnaires descendent de leur voiture, pour acheter une chemise ou un pantalon pèpè.

    Mais jusque-là, mon plus grand étonnement est de voir que des fois, les produits dits pèpè, sont vendus plus chers que des vêtements neufs du même type.

    Je me rappelle une fois, cela remontais à plus de dix ans, j’étais passé à Gerit, où j’ai vu un jeune homme marchandant une chemise pèpè. Le commerçant lui demande 300 $ ht.  Je ne sais pas si je me trompe, mais je trouve que c’est assez cher à demander pour une chemise kenedi. En tant qu’observateur j’étais étonné. Surpris. Et ce n’était pas diffèrent non plus pour le jeune homme qui marchandait. Ce dernier de dire :

-          Men poukisa ou mande tout kòb sa pou chemiz la ?

    Devinez quelle a été la réponse du vendeur ?

-          Se pèpè wi ki nan men w la, dit le monsieur.

    Comme quoi, c’est normal que l’on puisse demander autant pour quelque chose déjà utilisé. Le monsieur a eu le culot de dire à l’autre : s’il n’a pas idée de ce qu’il vient de marchander. S’habiller avec du kenedi devient donc normal, voire prestigieux. Voilà où nous en sommes arrivés ! C’est à ce niveau-là que nous nous retrouvons aujourd’hui.

    J’ai aussi vécu un autre exemple. Cette fois, c’était un matin. Je descendais la route de Gérald bataille, pour ceux et celles qui connaissent Delmas 33. Je faisais du piéton. Et il y avait une femme. Elle était accompagnée de sa fille, une petite qui ne pouvait avoir, à cette époque, pas plus que trois ou quatre ans, car elle savait déjà parler. La petite était très éveillée. Intelligente. Elle était gaie. Arrivé près d’une marchande qui ouvrait un bal de kenedi, l’enfant de signaler à mère :

-          Manmi ! Manmi ! men rad pèpè.

    J’étais un peu surpris. Et l’enfant de reprendre à nouveau :

-          Manmi ! Manmi ! men rad pèpè.

    L’enfant attirait l’attention de sa maman sur ce nouveau bal de pèpè, comme on le dit dans le langage kenedi, qu’on est en train de casser. On peut poser un tas de questions à propos. Pourquoi ça a attiré l’attention de la petite fille ? Pourquoi a-t-elle insisté ? Peut-être, parce que dans son environnement proche, l’enfant n’a reçu que des commentaires élogieux et prestigieux vis-à-vis du pèpè. Peut-être aussi que la majorité de ses vêtements ne sont que des pèpè.

    Toute suite après, on pouvait entendre la mère répliquer :

-          Mwen pa achte nenpòt rad non met sou pitit mwen. Se pèpè m met sou li.

    Oui c’était ce qu’elle a avancé. Et c’est la réalité. Mes chers amis-es, voilà où nous en sommes aujourd’hui. Nous vivons dans un pays où la fameuse marque nationale est le pèpè. Nous vivons dans un pays presque chaque demoiselle a une petite dette à une marchande de pèpè. C’est la pèpètisation nationale. Oui, c’est à ce niveau-là que nous sommes. L’étiage. On est descendu très bas. Trop bas même.

    Mais… faut-il continuer à vivre ainsi, dans une telle boue sociale ? Dans cette pratique généralisée et systématisée ? Le faut-il ? Comment l’étranger peut-il vous respecter, s’il voit sur nous – pendant que nos haussons notre collette – que nous portons une chemise qu’il a jetée l’année dernière, si nous portons ses « restes » ? Pensez-y.

 

 

Port-au-Prince, Le 03/ 05/ 2013

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19 février 2013 2 19 /02 /février /2013 13:57

NB: Ce texte a deja ete publie dans le quotidien haitien Le Nouvelliste en date du 26 septembre 2012.

 

Monsieur le recteur,

 

Je m’empresse de vous exposer le sujet suivant qui à mes yeux se révèle d’une grande importance. Mon souci, c'est que vous en soyez informé le plus vite que possible. Je crois qu'il n'est pas encore trop tard.

 

Monsieur le recteur, je vais droit au but: l'université de Limonade est mal nommée. L'appellation Université Roi Henri Christophe n'est pas correcte. Et en tant que recteur de l'Université d'Etat d'Haïti (UEH), il est de votre devoir de veiller au prestige et à l'image de l'UEH, cette noble institution qui a déjà formé plusieurs générations d'hommes et de femmes éparpillés sur toute la planète, servant à l'avancement de la science, qu'on retrouve particulièrement au Canada, en France et aux Etats-Unis d'Amérique.

 

A ma connaissance, ce projet de campus universitaire haïtien a été celui du rectorat. Toute une bataille médiatique a été enclenchée pour qu'il reste sous la férule de l'UEH. Ce qui implique que toute erreur est de la responsabilité de l'Université d’Etat d’Haïti.

 

Je ne sais pas qui a eu l'idée de nommer ce don du gouvernement dominicain «l'Université Roi Henri Christophe», mais permettez que je signale, monsieur le recteur, que l'appellation n'est pas correcte. Je pourrais même dire que c’est une erreur grave. Ce qui existe et qui est correct, c'est «Roi Henri 1er ». Henri Christophe, c'était le soldat, le général, le président, mais pas le Roi. Le Roi; c'est Henri 1er.

 

De même, il n'existe pas d’Empereur Jean Jacques Dessalines. Cela ne se dit pas. Ce qui se dit et qui est correct, c'est «Empereur Jacques 1er ». C'est de l'histoire, de la bonne mémoire, de la bonne assimilation tout simplement. C’est bien apprendre. C’est bien comprendre, et bien s’entendre aussi.

 

Vous allez être d'accord avec moi monsieur le recteur, à un moment où l'on remet en question les diplômes en provenance d'Haïti, il y a des erreurs qu'il ne nous est pas permis de commettre. Un bon universitaire étranger n'aurait jamais dit Roi Henri Christophe, parce qu'il sait que les rois marchent toujours avec un titre nobiliaire.

 

C'est bien malheureux, avec tous ces historiens que nous avons dans ce pays, qu'aucun d'entre eux n'ait pu vous en faire la remarque. Et ça passe comme une lettre à la poste. Mais que vont continuer à penser de nous ces universitaires étrangers qui se font toujours passer pour des experts? Et quels experts? C'est leur donner raison, leur donner davantage d'arguments pour mettre en doute la formation de nos universitaires.

 

J’ai pendant longtemps accepté de me taire, espérant que quelqu’un de mieux placé ferait la remarque. Mais on dirait qu'aux yeux de tous, l'anormal est vu comme normal. Nos grands intellectuels, historiens, professeurs et autres n'ont rien dit. C'est bien malheureux. C’est regrettable...

 

Mais permettez-mois toutefois, monsieur le recteur, de vous dire, qu'aussi simple que cela puisse paraître, par le simple fait qu’il s’agit d’une université, d’un espace qui a pour vocation de former des hommes et des femmes pour penser et panser la société, il se révèle du coup d’un détail d’envergure qui peut remettre en question toute la valeur intellectuelle du pays. L'appellation « Université Roi Christophe » est incorrecte. C’est un détail qui assurément, demain, servira de bouc-émissaire aux étrangers qui quotidiennement sont en quête d’arguments pour montrer et démontrer que nous sommes incapables de nous prendre en charge. Il faut le plus vite et à tout prix réparer cette erreur. Il faut redresser la barre, monsieur le recteur. Il n'est pas trop tard. Il n’est jamais trop tard d’ailleurs. Il y a toujours une porte de sortie. Alors, entamer la marche arrière vers la juste, sage, simple et bonne décision, en appelant l'université, non Université Roi Henri Christophe, mais l'Université Roi Henri 1er de Limonade.

 


Port-au-Prince, le 26 septembre 2012

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